• Le petit chariot de Nicolas et Pico

    Deux histoires sont consacrées à l'amitié de Pico et Nicolas. (les deux premières histoires ici)

    Voici le résumé de la première sur l'amitié naissante des deux jeunes enfants :

    Le papa de Nicolas emmène Nicolas et Pico chez un charretier, il achète quatre roues en bois et propose aux enfants de construire avec le bois de la maison une charrette pour aider la maman pour les courses.

    Nicolas et Pico vont devoir se rendre plusieurs fois chez le charretier pour fabriquer leur chariot afin de lui demander conseils.

    Pour les remercier de leur labeur et du service qu'ils rendaient à la maman ils purent trouver de nombreux jeux grâce au petit chariot que le papa leur laissait.

     J'ai bien aimé le début de cette histoire, il montre à l'enfant que l'adulte peut lui faire confiance pour de grands projets et que l'enfant a une réelle place dans la famille, qu'il est reconnu "utile". Ces besoins d'appartenance, d'amour, d'estime de soi et d'accomplissement de soi qui sont si importants pour être heureux.

    L'accomplissement personnel ne peut se réaliser que si l'enfant ( ou la personne) a une estime positive de lui-même qui passe par la confiance et le respect de soi... ainsi que la reconnaissance et l'appréciation des autres, ce fameux regard d'autrui sur nous...et l'enfant ne peut s'estimer lui-même que s'il se sent aimé des autres, que s'il se sent appartenir à un groupe (dont les plus importants sont sa famille, ses amis, l'école, ces fameux agents de socialisation dont on parle tant en ief quand on nous dit que notre enfant ne sera jamais socialisé s'il ne va pas à l'école...), ces besoins d'appartenance et d'amour venant des autres...

    Ces besoins correspondent aux trois niveaux supérieurs de la pyramide d'Abraham Maslow, un psychologue des années 1940. Selon lui on ne peut accéder au sommet (réalisation de soi) que si l'on a pu accéder dans l'ordre à chacun de ceux du dessous.... le premier étant les besoins physiologiques (manger, dormir, respirer...) et le second, les besoins de sécurité (cette fameuse sécurité intérieure..., vivre dans un environnement stable sans stress sans angoisse). 

    L'histoire continue justement sur l'importance de ses besoins... 

    Le pays connu un épisode de famine... De nombreuses personnes pauvres avaient très faim alors que dans le magasin du père de Nicolas les stocks étaient encore importants et pouvaient largement suffire jusqu'au retour de père qui allait revenir avec la prochaine cargaison...

    Le besoin de se nourrir en quantité suffisante est un besoin essentiel c'est pour cette raison qu'il demeure au pied de la pyramide de Maslow... L'économie du pays, l'argent du ménage permettent la réalisation de ce besoin. A l'époque de nombreuses familles pouvaient à peine se procurer à manger pour subsister... Mais aujourd'hui même si nous avons l'eau potable au robinet, l'électricité, le chauffage nous avons pourtant encore Emmaüs, les Restos du Coeur... certaines personnes encore aujourd'hui dans notre pays, un pays développé et non un pays du Tiers Monde sont encore au plus bas de cette pyramide... on n'est donc pas si loin de cette vieille histoire...

    Sachant la nouvelle récolte arrivant bientôt par bateau avec son père, Nicolas demanda à sa maman d'accepter d'en donner la moitié aux pauvres de la ville basse ...

    La maman après avoir convaincu avec ardeur l'intendant, donna son accord à Nicolas et lui demanda de fabriquer avec Pico des petits sacs de graines avec les grands sacs...

    On retrouve dans cette histoire la générosité de Nicolas et son empathie envers les autres peut-être parce que lui sait ce que c'est que d'avoir des réponses à ses besoins physiologiques et de sécurité... un enfant dont les parents donnent le bain, avec qui il "partage son eau", un enfant qui a des vêtements, des chaussures, un toit sur sa tête et des parents qui veillent sur lui... Dans l'histoire précédente la maman de Nicolas offrit des vêtements et des chaussures à Pico... un enfant qui vit dans la ville HAUTE alors que les pauvres vivent dans la ville BASSE... un peu comme pour la pyramide si l'on regarde bien...

    Si notre société reconnait que ces premiers besoins sont primordiaux elle a tout de même bien du mal à accepter de prendre le temps de s'y consacrer entièrement pour l'enfant... L'enfant doit grandir et vite ! La maternelle ouvre ses portes à deux ans, les parents se dépêchent donc de rendre leur enfant propre, l’école c'est important et en plus c'est moins cher que la crèche et il faut bien le dire c'est difficile de faire autrement il faut bien vivre et avoir de quoi pouvoir s'acheter à manger... Papa et maman travaillent, c'est toujours la course et on a toujours besoin de plus (on préfère parfois manger moins bien pour accéder au dernier téléphone à la mode (tiens on a de nouveaux besoins de consommations qui se retrouvent au même niveau que la nourriture, la propreté, la vêture ...

    Bien évidemment très peu de mamans peuvent réaliser des allaitements longs car elles sont trop fatiguées et la société n'aide pas vraiment même si elle fait des "efforts" dans la loi du travail, elle trouve vite ça "trop long"... ce n'est pas essentiel, il y a tellement de laits infantiles auxquels on a ajouté "chimiquement" tout ce qu'il faut et qui coûte il faut bien le dire un bras! ... trois semaines voir un mois c'est bien, trois mois c'est déjà plus que bien, six mois aller ok pour faire plaisir à l'OMS, 12 mois c'est ces mamans "bio", la nouvelle mode du moment ça va passer... mais plus ah ah vous allez en faire un pourri gâté et ce n'est pas bien saint tout ça dixit une ostéopathe bien gentille qui osa dire à mes parents que d'avoir allaité mon fils pendant 4 ans il ne quitterait jamais de sa vie entière notre maison et bien évidemment sa mère!!!.. c'est pour le Tiers-Monde, ils n'ont pas le choix eux !!!! Pico tu as de la chance toi tu peux téter autant que tu veux ! Nicolas, désolée pour le coup être né dans une famille riche le lait de la vache c'est mieux pour toi !!! c'est que l'Homme est le seul mammifère qui boit le lait d'un autre mammifère pour grandir mais qu'importe l'Homme sait mieux ce qui est bon pour lui que Mère Nature, c'est vrai que sur les presque 4,54 Milliards d'années de notre Terre le brave Homo sapiens y vit depuis environ 200 000 ans... 

    Quant au besoin de dormir, en général la première question qu'on nous pose et celle de savoir "à quel âge il a fait ses nuits?" suivit de "il fait combien d'heures de sieste?"... bien évidemment lorsque l'on souhaite être bienveillante et maternante et qu'on essaye de respecter le rythme de bébé on est vite hors norme....

    On en revient encore une fois au temps ! Cette société qui ne nous laisse plus de temps pour vivre, qui voudrait toujours aller plus vite et qui ne prend pas en compte la notion du temps chez l'enfant, chez le bébé qui lui n'a pas des journées de 24 heures, dans le ventre de sa mère il n'y avait ni jour ni nuit... le jour, la nuit, les siestes, les micros-siestes avec l'allaitement qui revigorent bébé pour 4 heures... certains ont besoins de beaucoup de sommeil, d'autres de beaucoup moins mais au début aucun d'eux n'est rythmé aux 24 heures et pourtant il faut qu'il fasse ses nuits et le plus vite possible...

    Pico connaissait les familles qui avaient le plus besoin d'être aidées, il allait donc avec Nicolas déposer de petits sacs de graines avec leurs chariots.

    Bizarrement on se demande si Nicolas connaissait les familles de la ville haute aussi bien....

    "Quelle joie de pouvoir à la nuit tombante, déposer discrètement leurs cadeaux!" Quant les gens découvraient les petits sacs sur leur fenêtre ou sur le palier de la porte les enfants avaient déjà disparu...

    Le besoin de sécurité (physique et intérieur) se trouve juste après les besoins physiologiques et juste avant les fameux besoins d'appartenance et d'amour... Pourtant Nicolas n'offrait pas les paquets de graines aux personnes directement, il les déposait en cachette la nuit.... Il avait une belle maison, ne manquait pas de nourriture, d'eau, de vêtements, de chaussures... il avait une maman qui s'occupait de lui, un papa qui lorsqu'il était là lui accordait de l'attention et de l'amour également et il avait un ami... avait-il besoin de plus? de remerciements des pauvres gens à qui il offrait ses graines?

    Lorsque le père revînt de son voyage, il pensait que l'intendant avait amassé une belle fortune pour le magasin et pourtant lorsque Nicolas et sa maman lui racontèrent ce qu'ils avaient fait il ne se fâcha pas... La mère raconta au combien les enfants avaient bien travaillé pour aider tous ces gens et le père répondit que dans les Ecritures il était dit: "Si quelqu'un possède deux tuniques, qu'il en donne une à celui qui n'en n'a pas" et fut heureux que sa famille ait prise cette décision en son absence même si pour cela ils avaient moins d'argent que prévu pour vivre et faire tourner le magasin...

     En lisant la fin de cette histoire loulou dit "Oh c'est comme Saint-Martin qui a offert la moité de son manteau rouge au mendiant!". Le mendiant qui n'avait pas d'argent, pas de logis, pas de nourriture, pas de vêtements, les enfants qui étaient dehors très tard et surement très pauvres à qui il offrit des brioches en remerciement d'avoir retrouvé son canasson... encore une histoire qui parle de l'importance de ces besoins fondamentaux qui nous permettent d'être heureux.

    La seconde histoire relate la suite et fin de l'amitié de Nicolas et de Pico:

    Nicolas et Pico rentrèrent de ballade avec leur chariot vide lorsqu'ils rencontrèrent une fillette infirme qui était assise à terre et qui jouait avec ce qu'elle avait autour d'elle, de la poussière et un bâton pour la faire voler...

    Le besoin de se mouvoir est aussi un des besoins essentiels physiologiques...

    Nicolas proposa à Pico d'emmener en ballade la petite fille, il alla voir la mère de l'enfant et très poliment lui demanda si elle ne pouvait marcher. La mère très interloquée par cet enfant bien habillé et si poli lui expliqua qu'elle ne pouvait marcher. Nicolas demanda alors toujours aussi poliment s'il pouvait emmener la petite en ballade dans la ville avec son chariot à la grande joie d'Aspa (la petite fille). La maman donna son accord et les accompagnèrent...

    J'adore cette histoire, elle montre que même si la vie n'est pas toujours belle, que si l'économie du ménage ou la santé de la famille ne permet pas de répondre entièrement à ces besoins primaires, il y a toujours une possibilité de la rendre plus belle avec de petites choses pourtant si importantes... quelques graines à partager, un chariot à prêter... avec tout simplement un peu d'amour et de générosité sans en attendre aucune reconnaissance...

    Pourtant le besoin d'estime de soi c'est aussi la reconnaissance des autres, Nicolas avait-il peut être tout simplement besoin de la reconnaissance de ceux qui l'aiment, ses parents et non forcément tous ceux qu'il pouvait aider... L'être humain a besoin d'être reconnu pour se sentir aimé et valorisé afin de se réaliser pleinement mais aujourd'hui plus rien n'est "gratuit", les actes de la personne sont plus importants aux yeux d'autrui que la personne en elle-même. On ne s'intéresse plus à la valeur (les idéaux dominants de notre société) mais juste à l'action en elle-même (la norme, la règle de conduite, ce que peut ou ne peut pas faire un individu dans une société...).

    Pourtant une même valeur peut-être transmise et matérialisée de bien différentes manières. Un enfant peut-être instruit en milieu scolaire public, privé, par correspondance, chez lui en suivant des pédagogies dites alternatives ou encore en unschooling (apprentissage en totale liberté)ou encore de manière itinérante en suivant ses parents à travers la France sur une péniche ou à travers le Monde... peut importe la manière, la norme sociale utilisée du moment qu'elle permet l'instruction de l'enfant... il y a bien évidemment des normes sociales formelles qui encadrent et veillent au respect de ses valeurs comme la visite de l'Inspecteur de l'Académie ou de la Mairie mais aussi des normes plus informelles qui constituent la "pensée" de notre société, cette "pensée" qui est parfois si jugente...

    Durant leur ballade Nicolas et Pico virent au bord de l'étang un garçon infirme jouer dans le sable, "Aussitôt, ils le hissèrent sur le chariot accompagné de sa mère"... Le lendemain il y avait quatre enfants.... Nicolas et Pico étaient heureux mais il suaient à grosses gouttes, le chariot était lourd...

    Nicolas demanda la permission à son père de pouvoir prendre l'un des trois ânes de l'entrepôt afin de prendre tous les enfants... et les ballades se poursuivirent au grand bonheur des enfants et de leurs parents.

    Il suffit parfois de pas grand chose pour combler un besoin essentiel...

    Au bout d'une année, lorsque les passants voyaient Nicolas et Pico ils ne disaient plus "Regardez le bon Nicolas et Pico le coquin!" ils disaient : "Regardez, Pico et Nico arrivent!" car ils étaient aimés de tous...

    Nicolas et Pico avaient offert un peu d'eux-même sans rien en attendre en retour car ils se sentaient aimés de leur famille, ils s'aimaient aussi l'un et l'autre d'une belle amitié... et pourtant ils avaient trouvé encore plus d'amour et étaient devenus de vraies figures d'une ville, ils étaient aimés de tous et reconnus et appréciés sans distinction, les mamans des enfants infirmes et leurs propres parents leurs faisaient confiance, tout ce dont on a besoin pour avoir une bonne estime de soit et pouvoir enfin se réaliser soi-même...

    Même si Pico et Nicolas étaient de bons amis et se ressemblaient beaucoup dans la générosité et l'amour qu'ils donnaient un seul point les rendait différents: Nicolas apprenait à lire, à écrire, en suivant les cours des moines à l'Eglise alors que Pico lui passait volontiers plus de temps chez les artisans et devint mousse puis marin sur un navire d'Epiphane... Ils ne se virent plus autant pourtant "Chacun d'eux était heureux".

    Afin de nous rappeler de l'amitié de Nicolas et de Pico et des dons de générosité qu'ils ont fait avec amour de leurs prochains sans en attendre de retour nous avons réalisé un petit chariot en play-maïs pour notre panier de Saint-Nicolas puis y avons ajouté un âne puis un enfant, deux enfants puis quatre enfants...

    Le petit chariot de Nicolas et Pico

     

    Je trouve ces histoires merveilleuses car elles ouvrent à la discussion et lors du quotidien je peux m'en resservir avec loulou lorsque nous rencontrons certaines situations qui sont difficiles à comprendre pour un enfant... Bien évidement je ne lui ai pas parlé de la pyramide de Maslow... mais ce qui me plait aussi en ief c'est que nous en profitons également pour réaliser un travail sur nous-même, pour nous réconcilier aussi avec des souvenirs d'une école parfois difficiles et des connaissances oubliées depuis bien longtemps ou pas vraiment acquises... je me suis déjà bien réconciliée avec les mathématiques grâce notamment à Maria Montessori et aux réglettes Cuisenaires et Attrimaths, je compte bien faire pareil avec la grammaire....

    Cette pyramide de Maslow est au coeur des conversations du moment. Elle a d'ailleurs été revisitée, actualisée par des chercheurs récemment visant à prendre en compte la psychologie actuelle. Je vous ais parlé de ces histoires telles que je les ai découvertes avec mes connaissances "universitaires"... voici un lien sur l'article de cette revisite par les chercheurs montrant l'importance des besoins primaires mais aussi une autre manière de les aborder qui va changer le haut de la pyramide. Maslow avait-il tord? Son point de vue était-il correct à son époque mais plus aujourd'hui? L'évolution de notre société a-t-elle changé la donne?... je vous laisse y méditer en tant que parents...

    La pyramide de Maslow revue et corrigée par des chercheurs

     

     

     

     

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